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EUTERPE, LIVRE II.

observent toutes ces coutumes[1] ; mais ceux qui demeurent dans la partie marécageuse suivent les mêmes usages que le reste des Égyptiens, et, entre autres, ils n’ont qu’une femme chacun, ainsi que les Grecs.

Quant aux vivres, ils ont imaginé des moyens pour s’en procurer aisément. Lorsque le fleuve a pris toute sa crue, et que les campagnes sont comme une espèce de mer, il paraît dans l’eau une quantité prodigieuse de lis que les Égyptiens appellent lotos[2] ; ils les cueillent, et les font sécher au soleil ; ils en prennent ensuite la graine : cette graine ressemble à celle du pavot, et se trouve au milieu du lotos ; ils la pilent et en font du pain, qu’ils cuisent au feu. On mange aussi la racine de cette plante ; elle est d’un goût agréable et doux ; elle est ronde, et de la grosseur d’une pomme. Il y a une autre espèce de lis, ressemblante aux roses, et qui croît aussi dans le Nil. Son fruit a beaucoup de rapport avec les rayons d’un guêpier : on le recueille sur une tige qui sort de la racine, et croît auprès de l’autre tige. On y trouve quantité de grains bons à manger, de la grosseur d’un noyau d’olive : on les mange verts ou secs.

Le byblus[3] est une plante annuelle. Quand on l’a arraché des marais, on en coupe la partie supérieure, qu’on emploie à différents usages : quant à l’inférieure, ou ce qui reste de la plante, et qui a environ une coudée de haut, on le mange cru, ou on le vend. Ceux qui veulent rendre ce mets plus délicat le font rôtir dans un four ardent.

  1. Cela ne se rapporte point aux usages établis à Chemmis, mais à ceux dont il a été fait mention plus haut.
  2. « Le lotus est une nymphée particulière à l’Égypte, qui croit dans les ruisseaux et au bord des lacs. Il y en a de deux espèces, l’une à fleur blanche, et l’autre à fleur bleuâtre. Le calice du lotus s’épanouit comme celui d’une large tulipe, et répand une odeur suave, approchante de celle du lis. La première espèce produit une racine ronde, semblable à une pomme de terre. Les habitants des bords du lac Menzalé (Tennis) s’en nourrissent. Les ruisseaux des environs de Damiette sont couverts de cette fleur majestueuse, qui s’élève de deux pieds au-dessus des eaux. » (Savary, Lettres sur l’Égypte.)
  3. C’est le papyrus. Bernard de Jussieu et le comte de Caylus ont décrit avec beaucoup de détails la manière dont les Égyptiens fabriquaient le papier avec cette plante. Voyez les Mémoires de l’Académie des inscriptions, t. xxvi, p. 267.

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