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le bateau de mon enfance

Quelle peine à assister à cette disparition ! Je regrette de n’avoir pas été de ce temps béni où tout était jeune : voilures, vaisseaux et équipages !

Les grands ports ont cessé d’être romantiques depuis que les voiles sont pliées pour toujours.

Les vrais marins ont disparu avec leurs voiles — les nouveaux sont devenus rares depuis que la vapeur a remplacé la voile ! tristesse…



Mon « Ailée » n’est pas un voilier comme les autres — regardez-la attentivement.

Les autres reposent dans leur élément, elle est seulement posée sur l’eau.

Sa coque fine et sombre retient à l’avant son emblème, deux grandes ailes ouvertes ; elle ressemble à un oiseau léger et rapide qui va s’envoler.

Ses mâts et ses bômes retiennent aussi d’autres ailes prêtes à s’ouvrir !

Même au port, tout, dans ses lignes, est départ et vitesse ; elle invite ceux qui la regardent à l’aller voir passer, toutes voiles dessus, tant elle est belle !

Elle n’a jamais l’air inerte, même au repos.

Elle vit, elle ne dort pas ; dans son immobilité, elle attend, le temps — d’une escale — pour fuir au