Page:Hériot - Une âme à la mer, 1929.pdf/124

Cette page a été validée par deux contributeurs.
118
une âme à la mer

NOSTALGIE


Mon Ailée est sans moi à la mer, elle navigue et je ne sais rien, mon esprit est cependant embarqué et veille inlassablement sur elle.

Je me sens désaxée, comme perdue d’être de nouveau à terre.

Comme je suis détachée, comme je reste lointaine !

Je fais un effort constant pour m’intéresser à ce qui m’entoure et ressembler un peu plus aux autres, mais je n’y arrive plus.

Pardonnez-moi si je reste si peu de temps, mais il me faut mon horizon et je me sens en prison chez vous à terre.

Puis toutes vos bontés, vos attentions qui me comblent, m’attendrissent, me diminuent, je ne me sens plus moi-même.

J’éprouve la crainte de m’habituer à toutes ces douceurs.

Je veux pouvoir supporter la souffrance ou la joie avec le même sourire.

Je veux supporter le froid et le chaud sous le même manteau, je veux rester le marin que je suis devenue.

Pour cela il me faut vivre à la Mer !