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l’ascendant paternel soit toujours préféré à l’ascendant maternel du même degré.

Pendant que nous parlons de tutelle, ajoutons que le mari est tuteur de droit de sa femme interdite, mais que la femme d’un interdit n’a que la faculté d’être tutrice et, si elle est nommée, le conseil de famille règle la forme et les conditions de son administration.

La jeune femme. Enfin, Madame, je vois que la loi nous considère et nous traite comme des êtres inférieurs ; qu’elle sacrifie à l’homme non seulement notre dignité de créatures humaines, nos intérêts de travailleuses et de propriétaires, mais encore notre dignité maternelle.

Un fils, suffisamment imbu de la religion du Code civil, doit nécessairement considérer son père comme plus raisonnable, plus sage, plus capable que sa mère. Je ne vois pas trop ce que celle-ci aurait à lui répondre, s’il lui disait : il est vrai que vous avez risqué votre vie pour me mettre au jour, que vous avez passé bien des nuits près de mon berceau, que vous m’avez enveloppé de votre tendresse, appris ce qui est bien et aidé à le pratiquer ; il est vrai que je suis votre bonheur et votre joie ; mais mon père est vivant ; il a seul autorité sur moi ; je n’ai donc pas à vous consulter ; d’ailleurs à quoi bon ? Des hommes sages, des législateurs qui ont bien étudié votre imparfaite, votre débile nature, ont porté des lois qui me prouvent que vous n’êtes propre qu’à mettre au monde des enfants, et à vous occuper des soins du pot au feu.

On vous a toutes jugées si peu sages, si peu prudentes, si peu capables, qu’on vous refuse le droit de rien régir ; qu’on vous