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de la France, la femme est une nullité, une exploitée, une paria ;

Que son mari peut faire don du mobilier commun à sa maîtresse et mettre l’épouse sur la paille ;

Que le mari peut lui ôter ses vêtements de rechange, ses bijoux, pour en parer sa maîtresse ;

Et comme on lui ordonne l’obéissance, et qu’on la met sous le pouvoir de l’homme qui peut être brutal, il est clair qu’elle ne s’avisera pas de refuser l’engagement, l’aliénation, la vente de ses biens personnels, et exposera de la sorte elle et ses enfants à manquer de tout.

Et comme la femme n’est pas la nullité que suppose la loi ; qu'au contraire, elle travaille et augmente l’avoir commun ; que c’est souvent à elle qu’il est dû, le mari peut disposer du fruit de ce travail pour payer ses dettes, ses amendes, entretenir des femmes et se livrer à tous les désordres.

Parmi le peuple, on ne fait guère de contrat : donc un mari brutal et mauvais sujet peut vendre le petit ménage et les modestes ornements de la femme, autant de fois que celle-ci aura pu s’en procurer de nouveaux par son labeur personnel.

L’auteur. Je ne le nie pas ; mais ne pourrait-on dire que le législateur n’a pu supposer un mari capable d’abuser de son pouvoir légal ?

La jeune femme. Nous ne pouvons admettre une aussi pitoyable raison.

Les lois sont faites pour prévenir le mal : elles supposent donc la possibilité de le commettre : on n’en ferait pas pour des saints.