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pasteur chrétien, à quelque secte qu’il appartienne, il vous a rappelé que la femme doit être soumise à son mari comme l’Église à Jésus-Christ.

La jeune femme. Mais saint Paul ne m’interdit pas de recevoir quelque chose d’une amie, ni de faire une rente à ma vieille gouvernante qui ne peut attendre mon testament.

L’auteur. Eh ! qui peut assurer au législateur que vous ne soyez pas capable de recevoir d’un ami ? La femme, descendante d’Ève, n’est-elle pas, selon la pittoresque expression de saints auteurs, un nid d’esprits immondes, la porte de l’enfer, un être si corrompu que le baiser même d’une mère n’est pas pur ? En conséquence, ne doit-elle pas être tenue en perpétuelle suspicion ?

La jeune femme. Voilà d’infâmes paroles. Ainsi la loi ne ferait que continuer la tradition du Moyen Age, et son article 934 ne serait que l’expression du mépris attaché par les hommes au front de leurs mères !

Ah ! ça Madame, ne pouvons-nous, par un contrat, nous soustraire aux dispositions légales qui abaissent notre dignité ou nous réduisent en servage ?

L’auteur. Vous ne le pouvez pas : la loi frapperait ce contrat de nullité. Vous avez deux ressources : ne point vous marier, ou vous marier sous un régime qui vous laisse le plus indépendantes possible, en attendant que nous ayons fait réformer la loi.

L’union volontaire, non sanctionnée par la société, offre de tels inconvénients pour le bonheur et l’intérêt des enfants et de la femme, que je n’oserais la conseiller à personne. Reste donc à parler du choix du régime sous lequel on doit se marier.