rivière à traverser et douze milles de mauvais chemins dans les bois.
Les groupes formés devant l’église se dispersaient peu à peu. Certains regagnaient leurs maisons, ayant appris toutes les nouvelles ; d’autres, avant de partir, allaient passer une heure dans un des deux lieux de réunion du village : le presbytère ou le magasin. Ceux qui venaient des « rangs », ces longs alignements de concessions à la lisière de la forêt, détachaient l’un après l’autre les chevaux rangés et amenaient leurs traîneaux au bas des marches de l’église pour y faire monter femmes et enfants.
Samuel Chapdelaine et Maria n’avaient fait que quelques pas dans le chemin lorsqu’un jeune homme les aborda.
— Bonjour, monsieur Chapdelaine. Bonjour, mademoiselle Maria. C’est un « adon » que je vous rencontre, puisque votre terre est plus haut le long de la rivière et que moi-même je ne viens pas souvent par « icitte ».
Ses yeux hardis allaient de l’un à l’autre. Quand il les détournait, il semblait que ce fût seulement à la réflexion et par politesse, et bientôt ils revenaient, et leur regard dévisageait, interrogeait de nouveau, clair, perçant, chargé d’avidité ingénue.
— François Paradis ! s’exclama le père Chapdelaine. C’est un « adon » de fait, car voilà