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Ses paupières s’étaient abaissées, ses cils battaient très vite, mettant sur les joues roses, toutes pétries de lumière, une ombre bizarre.

Giraud alla vers elle, ému, anxieux, et, dans un balbutiement, il demanda :

— Est-ce que c’est vrai, ce que vous venez de dire ?… est-ce que vous vous souvenez encore de cet instant où j’ai été fou ?… est-ce que vous y pensez… sans colère ?…

Elle répondit, en appuyant sur lui son beau regard bleu.

— J’y pense sans colère…

Et, si bas qu’il l’entendit à peine, elle murmura :

— Mais j’y pense toujours !…

Puis, changeant brusquement de visage :

— C’est vous qui allez oublier, maintenant ?… oublier tout de suite ce que je n’aurais jamais dû vous dire ?… je vous en prie ?… faites ça pour moi ?…

— Oublier ?… comment voulez-vous que moi, j’oublie ?… vous savez bien que c’est impossible !…

Elle affirma :

— Il le faut, pourtant !… oui… vous vous direz que vous avez… que nous avons fait un rêve… un rêve très lumineux et très doux… de ceux dont on s’éveille heureux, troublé… avec, en quelque sorte, une vision de choses jolies et disparues, impossibles à définir… est-ce que vous n’en avez jamais fait de ces rêves-là ?… on ne peut, quel que soit