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tu en veux à Bijou de son charme… tu lui en veux de ce que personne ne peut résister à ce charme infini… et, au lieu de t’en prendre à Paul, qui est le vrai coupable, tu accuses cette petite méchamment…

Très douce, madame de Rueille répondit :

— Je n’accuse pas Bijou plus que Paul, grand’mère… je les accuse d’autant moins que je ne crois pas beaucoup au libre arbitre, moi !… oui… je vous indigne en vous avouant ça, je le vois bien… vous trouvez que je blasphème, n’est-ce pas ?… et pourtant, Dieu sait si ça rend indulgent, le genre de réflexions auxquelles je me livre parfois !…

M. de Clagny s’approchait, il demanda :

— Qu’est-ce que vous complotez donc toutes les deux dans ce petit coin ?…

— Rien !… — fit madame de Bracieux, — nous regardions Bijou qui me parait en train d’apprivoiser votre petit ami Bernés…

Le comte se retourna, inquiet :

— Apprivoiser ?… qu’entendez-vous par là ?…

— Dame ! ce que tout le monde entend !… il y a huit jours, quand ce garçon a dîné ici avec nous, il avait l’air gelé !… eh bien, je crois que le dégel approche…

— Bah ! — s’écria M. de Clagny dont le visage se rasséréna subitement, — j’oubliais qu’il a une liaison… une liaison qui l’enchante… à tel point qu’il veut épouser, ce qui enchante moins son père, comme bien vous pensez ?…