Page:Gyp - Bijou, Calmann-Levy, 1896.djvu/154

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

visage pâli, ses traits tirés, ses yeux largement cernés :

— Il faut que tu aies très, très mal pour avoir une mine pareille !... et pour avouer surtout que tu as quelque chose, toi qui poses toujours pour l’homme fort... Mon pauvre Jean !... je voudrais tant te savoir mieux !...

Elle s’inclina, et posant doucement ses lèvres sur les paupières meurtries du jeune homme, les y tint appuyées assez longtemps.

Jean de Blaye devint très pâle, puis très rouge, et, se levant d’un mouvement violent :

— Tu m’as fait peur !... — dit-il l’air gêné, le regard incertain, — c’est stupide !... mais je ne te voyais pas... et alors... ça m’a surpris...

M. de Clagny s’était levé, lui aussi, avec une sorte de colère, en voyant Bijou embrasser son cousin. Comprenant à quel point était ridicule son émotion jalouse, il se rassit et dit, goguenard :

— Si ce remède-là n’agit pas... c’est que la maladie de Blaye est incurable !...

M. de Rueille regarda avec envie Jean qui sortait du salon, et, s’adressant à Bijou d’une voix qui s’enrouait :

— Quand j’ai la migraine... et ça m’arrive souvent, hélas !... vous êtes moins compatissante. ..

M. Giraud restait pétrifié sur la petite chaise basse où il était assis. Les yeux fixés à terre, les lèvres serrées, il semblait n’avoir rien vu. Pierrot, lui, s’écria franchement :