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Assise, assez loin d’eux, madame de Nézel les regardait de son même air doucement résigné et triste. L’œil violet de Bijou coula de son côté, luisant entre les cils touffus, et elle acheva :

— Tu aimes quelqu’un qui ne t’aime pas !…

Jean de Blaye rougit violemment :

— Tu ne sais ce que tu dis !…

— Alors pourquoi rougis-tu ?… Oh !… que tu es orgueilleux !… ça te vexe que j’aie deviné ça !…

Après un silence, elle ajouta :

— Est-ce que tu le lui as dit ?…

— Si j’ai dit quoi ?… à qui ?… mais tu es folle, mon pauvre Bijou !…

— À mad…

Elle s’arrêta, le visage tourné vers madame de Nézel, et reprit :

— À celle que tu aimes… lui as-tu dit que tu l’aimais ?…

Il murmura d’une voix assourdie :

— Non !…

— Tu n’oses pas ?… pourquoi ?… j’entends tout le temps grand’mère, Bertrade et Paul… et l’oncle Alexis… répéter que tu es de ceux qu’on aime… elle aussi t’aimerait… et elle t’épouserait bien, va !…

Elle s’inclina, lui effleurant presque l’oreille de son souffle, sans se soucier de l’effet produit par cette familiarité, et proposa :

— Dis donc ?… si tu voulais ?… je lui parlerais bien, moi !… et je suis sûre de sa réponse…

Jean se leva d’un mouvement brusque, et, saisissant la main de Bijou :