Page:Guyot - Les principes de 89 et le socialisme.djvu/162

Cette page a été validée par deux contributeurs.

Et il était mort.

Mais aucun des chefs du socialisme n’aurait réclamé l’honneur d’avoir adressé à Baudin l’injure qui lui valut cette réponse d’un héroïsme si simple. Quant aux républicains, même depuis la guerre, beaucoup, pendant longtemps, protestaient qu’ils ne voulaient pas le pouvoir. Ils faisaient de la politique pour la politique, sans même se rendre compte que ce désintéressement impliquait l’absence de responsabilité. Ce fut Gambetta qui, audacieusement, brisa cette tradition républicaine et déclara que les républicains, se considérant comme capables d’exercer le pouvoir, devaient essayer de le posséder. Mais si Gambetta avait dit aussi : « On ne gouverne qu’avec un parti », il n’avait pas dit : — « On ne doit gouverner qu’au profit d’un parti. » S’il avait montré l’avènement des nouvelles couches sociales à la vie politique, il n’avait pas dit que la politique dût être faite exclusivement à leur bénéfice.

Il était réservé aux socialistes de rapporter d’Allemagne leur conception du parti ouvrier, de dire hautement qu’il devait se constituer à part dans la nation dans un but de spoliation, et de faire la théorie de la politique de « l’assiette au beurre ». Un idéaliste mystique, M. Benoît Malon, l’a traitée à maintes reprises, entre autres dans son livre : le Nouveau parti (1881).

Il pose en fait que « les partis politiques n’agissent qu’en vue de garantir leurs privilèges aux possédants ». Partant de cette prémisse si simple, il conclut que le parti ouvrier doit s’organiser pour les leur enlever. C’est la théorie de la guerre sociale.