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garantir des revenus ou des bénéfices. Vous invoquez les intérêts supérieurs de l’agriculture et du travail national. Soit. Vous m’avez même demandé de m’associer à vous pour cette besogne[1]. Mais quelle part m’en donnez-vous, à moi travailleur ? Vous réclamez le secours de « la société », je demande aussi à le partager, et avec d’autant plus de droit que « dans la société » je tiens, du moins au point de vue du nombre, une place plus large que la vôtre.

Devant ce langage, le protectionniste est d’autant plus obligé de rester muet que le socialiste pourrait encore ajouter :

— Pour vous protéger, vous frappez le blé, la viande, les vins, les matières indispensables à mon alimentation. À la douane, les tissus, les objets d’un usage commun, par conséquent le meilleur marché, ceux qui me sont destinés, supportent les droits les plus lourds. C’est donc sur mes besoins, et par conséquent sur mes privations, que vous demandez au gouvernement de garantir vos revenus et vos bénéfices. À mon tour, je me retourne et vous dis : Rendez-moi ce que vous me prenez ; je réclame ma part. Garantissez-moi mon salaire. Limitez mes heures de travail. Supprimez mes concurrents, comme les femmes. Supprimez le travail aux pièces qui peut être une incitation à une trop grande production à trop bon compte. Ceci est pour aujourd’hui ; mais demain il faudra que la propriété et l’usine soient entre mes mains seules. L’État sera le seul producteur, le seul commerçant, et tous les bénéfices seront pour moi.


  1. Lettre des grévistes de Lillebonne (Siècle, 7 juin 1893).