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ans, professeur de mathématiques à vingt-cinq, disait à Antoine Etex : « que cette École avait produit ce qu’elle devait produire ; que s’il avait eu un fils, il aurait préféré le voir entrer à l’École des arts et métiers de Châlons qu’à l’École polytechnique ; qu’aux Écoles des arts et métiers, du moins, un élève pouvait sortir avec des connaissances réelles et d’un futur praticien, au lieu que dans l’École célèbre, ses élèves, sortant même des premiers, n’étaient le plus souvent que des bons à rien et propres à tout. »

Bons à rien et propres à tout, voilà ce qui caractérise universellement toute notre éducation secondaire et supérieure. On entasse connaissances sur connaissances dans la tête des jeunes gens, matières sur matières ; on leur farcit le cerveau d’une gigantesque macédoine ; on y jette un vaste tohu-bohu de sciences de toutes sortes ; puis on leur dit : « Tirez-vous de là comme vous pourrez. » Et ce qui le prouve, c’est que les spécialités puissantes n’ont aucune chance d’être admis à cette École ; Evariste Galois, le prodigieux mathématicien, mort à vingt et un ans, y fut refusé, alors qu’il résolvait les plus formidables questions dans son cabinet.

De plus, rien de pratique, rien qui puisse servir. Des mathématiques pures, voilà ce qu’on leur donne. Quand il s’agit de les appliquer, ils éprouvent un étrange embarras. Ils savent, savent beaucoup, mais ils ne savent rien d’utile. Leurs cerveaux sont fatigués par l’effroyable travail auquel ils ont été soumis ; ils sont si pleins qu’on n’y peut plus y rien mettre ; ils sont desséchés par le feu auquel on les a livrés sans interruption, dans le four où on les a mis.

Arago a fait suivre sa Biographie de Gay-Lussac d’une longue liste, aussi détaillée que possible, des divers travaux qu’ont exécutés les anciens élèves de l’École polytechnique, afin de justifier cette École des accusations portées plusieurs fois contre elle.

Mais que prouve-t-il ? Il prouve que quelques-uns de ces