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Le voici : Ces établissements sont, avant tout, administratifs ; dépendant du ministère de l’instruction publique, ils sont condamnés à ne faire que de la science orthodoxe. Leurs professeurs n’ont nulle initiative. Ils doivent se traîner dans l’ornière, sans pouvoir en sortir. De plus, ils n’ont aucun motif d’émulation, car le public qui les entend n’est pas le plus souvent capable d’apprécier leur mérite.

Il faut commencer par affranchir ces établissements du joug auquel ils sont soumis. Si le gouvernement veut qu’ils soient réellement utiles, que leur rôle soit efficace, que leur influence soit réelle, il doit les délivrer de la centralisation qui les enchaîne complètement, leur faire perdre la déplorable uniformité qui les distingue : et pour qu’il y arrive, il ne doit plus se mêler de l’enseignement qui s’y professe. Les cours doivent se changer en conférences, dans lesquelles des esprits indépendants viendront tour à tour faire part de leurs lumières et de leurs travaux. Si l’État veut encore s’intéresser à ces Facultés, il doit borner son rôle à un rôle de subvention : qu’il entretienne des laboratoires, ouverts à tous ceux qui voudront y travailler, qu’il ait des monuments dans lesquels chacun pourra venir exposer la somme de ses connaissances, et alors cet enseignement, aujourd’hui inutile, deviendra réellement ce qu’il doit être. Les savants ne resteront plus confinés à Paris. Quand l’un d’eux aura fait une découverte importante, il se mettra en route et, grâce à la rapidité actuelle de nos voies de communication, il fera profiter de sa science tous les centres scientifiques de la France. Comme le public ne sera plus éternellement condamné à entendre le même professeur, à recommencer tous les ans le même cours, il se précipitera en masse sur la pâture nouvelle que lui offriront les novateurs qui viendront l’instruire. Un choc d’idées résultera toujours de ce tournoi qui éveillera les esprits, tandis que maintenant l’enseignement suit tranquillement son cours, comme un fleuve bien élevé, et est encore plus souvent stag-