Page:Guyot - L'Inventeur.djvu/479

Cette page n’a pas encore été corrigée

Tous les hommes d’État montrent la même prévoyance. L’exemple d’aucun d’entre eux ne corrige les autres : tous ont le même dédain pour les considérations philosophiques ; tous méprisent souverainement l’intérêt général ; tous, enracinés au présent, regardent le progrès, la civilisation, l’avenir comme le mal et cherchent par tous les moyens possibles à combattre ce mal. Aussi comme ce mal a ses racines dans le caractère de ceux qui, n’étant pas optimistes, ont foi dans la perfectibilité humaine et veulent de toutes leurs forces contribuer à créer un avenir meilleur, ils se gardent bien d’encourager cet accroissement de vie, ce développement de puissance ; ils paralysent, au contraire, autant qu’ils le peuvent, ce déploiement de vigueur, arrêtent cet élan, compriment cette énergie ; ils serrent les freins, ils ferment les soupapes et ils s’étonnent que la machine éclate !

Quoi qu’il en soit, malgré eux, malgré leurs efforts sacrilèges, il viendra un temps où nulle entrave ne gênant plus l’homme, où ses droits à la propriété, à l’instruction étant assurés, où le principe de l’association s’étant répandu et ayant triomphé de l’égoïsme, il n’aura plus besoin d’employer la plus grande partie de son existence, de consumer toute son énergie à se débattre dans les liens avec lesquels l’ont enserré les préjugés du despotisme, et il pourra user de toutes ses facultés, sans nulle déperdition de force, pour atteindre le but qu’il se sera posé. Et alors quel magnifique accroissement de vie ! quelle immense production ! quelle activité fiévreuse !

Et dans ce temps comme l’effort sera presque nul, comme le travail manuel sera en grande partie anéanti par la machine, comme nul ne sera plus condamné à ces opérations abrutissantes dans lesquelles s’étiolent l’intelligence et le corps, le développement intellectuel sera proportionné à l’accroissement du bien-être.

La production étant immense, la consommation se fera