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entendu, un secret de la comédie que toute la presse révèle le lendemain du jour où il est employé. Ils ne comprennent pas l’avenir parce qu’ils ne comprennent pas le présent. Prétendant gouverner et diriger les hommes à leur gré, ils dédaignent l’étude des principes organiques des sociétés. Ils traitent d’utopistes, de rêveurs, d’idéologues, comme disait Napoléon, ceux qui cherchent à connaître les ressorts de l’organisation sociale. Ils ont un suprême dédain pour ceux qui viennent leur dire qu’ils suivent une fausse route. Ils répondent aux téméraires : faites votre métier et laissez-nous faire le nôtre. Ils ont un magnifique mépris pour le gredin qui du haut de sa mansarde prétend régenter les ministres et gouverner l’Etat ! Et ils s’étonnent ensuite quand tout à coup, sans qu’ils s’y attendent, sans qu’ils aient aperçu aucun nuage sur l’horizon, l’ouragan populaire s’élève et emporte leur pouvoir sur son passage. Ils ne peuvent en croire leurs yeux ; ils refusent de voir la vérité, ils ne peuvent se convaincre de ce qui se passe ; ils sont calmes même et surtout alors qu’ils sont lancés sur la voie fatale au bout de laquelle se trouve le précipice où va s’engloutir leur puissance ; une fois qu’ils y sont arrives, ils ne peuvent comprendre comment ils sont tombés, ils cherchent la cause de leur ruine, et comme ils sont habitués à ne voir que de petites causes, ils attribuent ces effets à quelque petite intrigue d’antichambre et de cabinet. Des successeurs arrivent ; ils ne voient pas plus loin que leurs prédécesseurs ; tous les hommes d’Etat, en arrivant au pouvoir, sont frappés de cécité. Aveugles comme des taupes, ils cherchent à se bâtir un empire sous la terre, par les voies étroites et tortueuses de l’intrigue ; le grand jour leur fait peur ; la ligne droite les effraye ; ils ne cherchent que méandres et souterrains.

Aussi ces grands hommes d’Etat n’ont-ils garde de comprendre les nécessités de leur époque, les intérêts de l’avenir, de poser le principe des sociétés et d’étudier leur mo-