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amener de terribles crises : et nos jurisconsultes, auxquels l’instruction classique, qui domine nos facultés de droit comme nos lycées, n’a montré que le passé au lieu de développer en eux le sens moderne, ne comprenant pas plus le mécanisme actuel du crédit qu’ils ne comprennent celui du télégraphe électrique, poussent toujours la loi à ses dernières conséquences, et, au lieu d’élargir son cadre si étroit par une large interprétation puisée dans les besoins nouveaux de la société, le resserrent d’autant plus que, comprenant moins les motifs de sa sévérité, ils éprouvent le besoin de les affirmer plus hautement.

Cette méfiance générale contre les associations de toute sorte est poussée à tel point que le gouvernement n’accorde l’autorisation d’exister à une société scientifique qu’avec la plus extrême répugnance.

Il parait avoir tellement peur qu’elle ne soit le prétexte de quelque complot qu’il fait traîner pendant deux ou trois mois les choses en longueur, soumet à une enquête chacun des membres de cette société, oblige à quantité de courses et de déplacements inutiles et fait dépenser une somme immense de temps et de force qui serait beaucoup mieux employée ailleurs.

Que le gouvernement se montre plus large et plus libéral , voilà son devoir ; que l’inventeur, à son tour, ne place pas tout son espoir dans le gouvernement, qu’il se guérisse de cette maladie française qui pousse chacun à demander sans cesse des secours à l’État, comme s’il ne pouvait rien faire sans lui ; qu’il s’habitue à compter sur ses propres forces et non plus sur les protections des gens de bureau ; qu’il s’aide lui-même... et il parviendra.

Pour cela il n’a qu’à prendre modèle sur l’Angleterre et sur l’Amérique. Là chacun est habitué à compter sur lui, sur ses forces, et non sur des secours toujours éventuels et pour l’obtention desquels on dépense le temps, la force et l’habileté qui auraient fait roussir dix fois son œuvre, si