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D. — Vous pensez donc que c’est un bon moyen de prévenir l’abus des patentes que d’avoir un système de concession coûteux et compliqué ?

R. — Je ne dis pas compliqué, je dis seulement coûteux ; je ne crois pas qu’il soit désirable qu’aucune chose qui peut être simple soit compliquée.

D. — Vous croyez nécessaire d’avoir une barrière à opposer à toute personne qui s’imagine qu’elle a fait quelque invention, quoique son idée soit parfaitement absurde et qui demande une patente ?

R. — Oui.

D. — Et vous croyez que le haut prix est la meilleure barrière qu’on puisse lui opposer ?

R. — Je n’en connais pas d’autres.

Toujours la conséquence de l’esprit de la loi.

Le brevet est privilège ; donc il faut restreindre autant que possible ceux qui veulent l’obtenir. Si vous admettiez que le brevet, au contraire, n’est que la reconnaissance d’un droit de priorité, comme au lieu de restreindre le nombre des gens qui peuvent y prétendre, vous devriez faire, au contraire, tout votre possible pour l’augmenter et par conséquent leur faciliter tous les moyens pour l’acquérir, vous ne viendriez pas proposer une mesure analogue.

Qu’amène cette touchante sollicitude pour les inventeurs qui prennent des patentes absurdes ? Elle amène que non-seulement vous découragerez ceux-ci,— ce qui peut quelque fois être un mal, — mais qu’encore vous arrêterez les inventeurs vraiment sérieux. Il n’y a pas de raison pour que ceux-ci soient plus riches que les autres. Vous voulez donc ne laisser alors la permission de prendre des patentes qu’à ceux qui auront de l’or. Vous voulez que l’aristocratie d’argent enfante encore l’aristocratie des inventeurs. Il ne vous suffit pas de laisser souvent le malheureux créateur devenir la proie d’un capitaliste qui s’empare non-seulement des profits de son œuvre, mais encore de l’honneur qu’elle peut