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peuple, pour le roi de Prusse, c’est-à-dire pour cette abstraction qui se nomme la société, le souverain, ou mes frères, c’est fonder la société sur un sentiment, je ne dis pas inaccessible à l’homme, mais qui, érigé systématiquement en principe, n’est qu’une fausse vertu, une hypocrisie dangereuse…

« Dévouement ! je nie le dévouement ; c’est du mysticisme. Parle-moi de doit et avoir, seul critérium à mes yeux du juste et de l’injuste, du bien et du mai dans la société. A chacun suivant ses œuvres d’abord ! »

« A chacun suivant ses œuvres, » répète Proudhon après Saint-Simon. Là est la loi de justice, là est la loi du progrès.

Vous essayerez en vain d’en substituer une autre, vous n’y parviendrez pas ; vous n’arriverez qu’à paralyser les forces, à engourdir les intelligences, à arrêter tout essor, à plonger l’homme dans une indifférence semblable à celle du Turc, de l’Indien, du lazzarone, qui, sûrs de trouver de quoi manger, ne bougent plus dès qu’ils ont quelques centimes en poche.

C’est en vain que M. Cabet dira : « Celui que son génie rend plus utile, n’est-il pas assez récompensé par la satisfaction qu’il en éprouve ? »

L’homme est égoïste ; s’il aime à travailler, il aime à jouir. De plus, il est un animal remplissant toutes les fonctions de la bête ; il mange.

C’est en vain que Vigarosy dit aussi :

« L’inventeur n’a-t-il pas pour lui le charme de la paternité ? »

C’est en vain qu’il propose, pour le récompenser, de créer un ordre de mérite avec de petites médailles de première, de deuxième et de troisième classes.

Charme et médailles ne remplacent pas plus la jouissance d’un droit qu’ils ne remplacent un bifteck.

Je comprends la délicatesse de ce bon Vigarosy qui ne veut pas matérialiser l’invention (c’est lui-même qui sou-