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elle est digne de ces messieurs ! Cela est contraire à l’ordre logique des choses ; donc... cela n’est pas, — ou plutôt cela est contraire à nos affirmations, à nos théories ; donc cela n’est pas. Gens naïfs qui croyez que les théories sont faites pour expliquer la nature : erreur 1 La nature est faite pour les théories, c’est leur très-humble vassale. Vous vous imaginez que la théorie est déduite des faits : folie ! Ce sont les faits qui sont adaptés à la théorie.

Quand les anciens étaient embarrassés pour expliquer un phénomène, ils le plaçaient au rang des prodiges : exemples : Le cheval de l’empereur Tibère, du corps duquel jaillissaient des étincelles quand on le frottait avec la main ; les javelots des soldats romains qui, pendant la nuit qui précéda la victoire que Posthumius remporta sur les Sahins, brillaient comme des flambeaux ; de même un verset du Coran déclarant que la femme peut porter trois ans, les musulmans crient au prodige ! Prodige ! mot absurde, qui n’a pas de sens, puisqu’il signifie qu’il ne peut pas être ; mais mot commode pour expliquer ce qu’on ne peut comprendre. Maintenant nos savants, quand ils se trouvent en présence d’un fait dont ils ne peuvent donner nulle explication, auquel ils ne peuvent adapter nulle théorie, s’en tirent d une autre manière.

Ainsi de nombreux paysans voient tomber une pierre à Lucé. Lavoisier, Cadet et Fougeroux terminent ainsi un rapport sur ce fait :

« L’opinion qui nous paraît la plus probable, celle qui cadre le mieux avec les principes reçus en physique, avec les faits rapportés par M. Bachelay, et avec nos propres expériences, c’est que cette pierre, qui peut-être était couverte d’une petite couche de verre ou de gazon, aura été frappée par la foudre et aura été ainsi mise en évidence. »

Les principes défendaient à la pierre de tomber. Il fallut qu’un académicien, M. Biot, vît des aérolithes de ses propres yeux pour que les principes acquis leur permissent d’exister.