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vérité, de supprimer aucune erreur : tout ce que te maître avait dit était loi. En vain les sens affirmaient un fait, en vain la raison l’admettait. S’il était contraire à la révélation d’Aristote, on le réputait faux et non avenu. Toute la science consistait à démontrer plus ou moins mal ce que l’on avait appris. On pouvait meme, grâce aux syllogismes, le démontrer sans y rien comprendre. »

Dans trois siècles d’ici, n’en dira-t-on pas autant de l’Académie ?

L’autorité ! toujours l’autorité, c’est le symbole qui a présidé à sa naissance et qu’elle gardera jusqu’à sa mort. Un jour, en effet, Louis XIV trouva bon de favoriser les sciences, il donna ordre à Colbert de fonder l’Académie et de donner des pensions à quelques adulateurs. Maintenant pourquoi s’étonner qu’elle soit si réglementée émanant de l’homme qui avait la passion du règlement ? qu’elle soit si despote, devant sa naissance à l’homme qui a dit : «L’État c’est moi ! » Prenant cette célèbre phrase et la changeant pour son usage personnel, chacun de ses membres dit de même : « La science c’est moi ! » Donc guerre à tous ceux qui veulent s’élever auprès de moi ; je n’admets pas d’égaux, je n’admets pas de rivaux, je n’admets que des aïeux. De ce sentiment vient le respect que professent nos savants pour la tradition. Certes nous sommes bien loin de vouloir, avec Descartes, isoler l’homme, l’enfermer seul avec lui-même dans un poêle, et lui faire oublier tout ce qui a été fait avant lui.

Non, nous acceptons la tradition, — nous recevons avec plaisir cet héritage de nos pères, — mais sous bénéfice d’inventaire.

La loi scientifique ne peut pas être plus absolue que la loi civile.

Ce que nous ne voulons pas, c’est qu’à la place de l’autorité biblique ou de l’autorité des anciens, on mette l’au-