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vingt fois pour une fièvre continue. Il saigne les enfants de trois jours et les vieillards de quatre-vingts ans. Il appelle fourbe et athée un médecin qui a refusé d’être saigné, et il souhaite que le diable le saigne. Mais si on pouvait tuer les gens impunément par ce moyen, défense de leur administrer des drogues qui pussent les empoisonner ; les novateurs même se séparent des chimistes qu’ils regardent comme ennemis de la Faculté : ils se défendent comme des enragés de faire alliance avec eux. Pierre Ozan soutient une thèse en faveur de l’antimoine ; mais remarquez bien que c’est Hippocrate qui a découvert ses vertus purgatives, sinon... il se garderait bien de les vanter. Ahl si Hippocrate avait découvert aussi la circulation du sang, certes la bonne Faculté s’en ferait le champion et la soutiendrait envers et contre tous. Mais c’était Harvey qui avait fait cette découverte. Pourquoi donc refaire la science pour le plaisir d’un médecin étranger ? De même pouvait-on admettre l’antimoine, qui venait de Montpellier, et le quinquina qui venait d’Amérique ?

L’orgueil de la Faculté le lui défendait. Elle n’était peut-être pas absolument ennemie du progrès, dit M. Maurice Reynaud, auquel nous empruntons presque tous ces détails, mais elle voulait que le progrès vînt d’elle et non d’ailleurs ; car rien de plus orgueilleux et de plus exclusif qu’un corps savant. La grande prétention des médecins au dix-septième siècle était d’être nobles : aussi quel dédain pour les chirurgiens qui n’étaient que des manœuvres aux yeux des docteurs.

Si un candidat au doctorat avait exercé la chirurgie, il devait s’engager sur serment et par acte passé devant notaire, à renoncer à l’exercice d’un art aussi infime ; « car, disent les statuts, il convenait de garder dans toute sa dignité et son intégrité, la dignité du corps médical. »

En vertu de ce principe, le docteur ne devait pas se souiller les mains en touchant un cadavre. Il ne devait pas