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académique est destinée à servir d’opium à ses assistants, procurant un sommeil paisible et une bonne digestion. Vous n’avez qu’à lire tous les discours et éloges académiques passés et présents, pour vous convaincre que tout nouvel arrivant est si bien frappé de cette vérité que, dès qu’il est élu, il commence parsemer des pavots sur la tête de ses confrères.

Et la preuve de cet amour de la tranquillité est la moralité caduque qu’affichent les académiciens ; car les académies sont excessivement morales. Elles sont, ce semble, les gardiennes des bonnes mœurs. Jules Janin ne pourra jamais faire un discours académique qu’ « à la porte de l’Académie française, » à cause de certains tableaux de l'Ane mort et la femme guillotinée ; Théophile Gautier, qui a commis mademoiselle de Maupin, ne doit pas avoir plus d’espoir ; M. Villrmain a parfaitement prouvé à M. Taine qu’il ne pouvait prétendre, avec les principes religieux qu’il professe, à aucun prix ; qu’ils ne s’étonnent donc pas de se voir préférer MM. tels et tels.

De même pour l’Académie des sciences. Les théories de M. Pouchet pouvant avoir leurs dangers, il a fallu que la vie privée de leur auteur garantît leur innocence. M. Flourens a eu soin de dégager la responsabilité de l’Académie, en motivant les raisons qui faisaient admettre, nonobstant, l’insertion d’un mémoire de M. Pouchet au compte rendu : d Voici une réponse de M. Pouchet à M. Coste. Je considère sa théorie comme très-aventurée : mais M. Pouchet est un homme très-entendu et aussi très-moral. M. Pouchet a autant de moralité que de talent. J’ai lu sa réponse et je suis d’avis de l’insérer au compte rendu. »

Avis aux inventeurs et à tous ceux qui veulent soumettre quelqu’idée à l’Académie. Qu’ils aient soin de joindre à leurs communications un certificat de bonnes vie et mœurs ; un billet de confession ne saurait non plus leur faire de mal.