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impossible à MM. Clegg et Samuda de trouver le plus faible appui à Londres.

Oh ! les hommes pratiques, les hommes positifs, qui n’ont plus de cœur, jusques à quand donc seront-ils les obstacles du progrès ? C’était Caton qui conseillait d’abandonner les vieux esclaves et de les laisser mourir de faim ; Caton qui formulait ce dicton qui a servi de texte au théâtre d’agriculture d’Olivier de Serres : « ne change point de soc, ayant pour suspecte toute nouvelleté. » Ces paroles sont encore en profonde vénération auprès de tous les laboureurs. Franklin est forcé d’écrire sur un champ ensemencé le mot plâtre pour donner un témoignage manifeste de sa puissance ; la charrue Dombasle est encore rejetée par bon nombre de paysans ; ils ne font pas de moyettes ; ils objectent contre les piocheuses, le fumier trop pailleux et contre les faucheuses, les taupinières. Ne riez pas ; j’ai entendu de mes propres oreilles deux braves gens les repousser pour ces raisons. Mais faites donc pourrir vos fumiers ! mais détruisez donc vos taupinières !

Voyez-vous la terrible position de l’inventeur trouvant ces réponses hôtes, recevant ces pavés à chaque pas qu’il fait. Que devient son œuvre au milieu de cette légion d’imbéciles acharnés après elle ? Comment peut-il l’imposer à tous les gens qui ne veulent même pas l’examiner, la voir et qui la condamnent d’avance. Quelle prise peut-il avoir sur les hommes, qui même après avoir vu des résultats pratiques, avoir palpé en quelque sorte ses avantages, ne la condamnent pas moins parce qu’elle est une chose nouvelle ? Quel courage ne faut-il pas qu’il ait pour soutenir contre tous une vérité que tous renient ? Quelle persévérance doit-il employer pour la faire comprendre à ces hommes qui ne veulent pas l’écouter, qui condamnent son œuvre sans l’entendre, qui sont tous pleins de préventions contre elle, qui sont ses ennemis systématiques, et qui, s’il veut monter à la tribune, sifflent et poussent des huées pour couvrir sa voix.