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d’affaires, de sciences, la femme lui répond : — Tu m’ennuies !

Et c’est vrai, il l’ennuie ; et pour lui plaire, il faut qu’il se mette l’esprit à la torture ; et comme cette contrainte le lasse, il laisse sa femme aller où bon lui semble, prend sa canne et va de son côté.

Les deux époux ne se voient que le moins souvent possible. Leur vie est séparée. Monsieur fait demander à madame si elle peut le recevoir. Chacun vit à part. Nul lien commun. Madame demande de l’argent à son mari quand elle en a besoin. Si celui-ci lui explique qu’il ne peut lui en donner, lui parle de ses affaires, elle le boude, et si ces refus se renouvellent souvent, elle en arrivera à le haïr. Elle ne voudra entendre à rien et fera peser sur son mari les plus injustes soupçons. En vain celui-ci fera-t-il tous ses efforts pour lui être agréable, jamais elle ne trouvera qu’il remplit tous ses devoirs à son égard. S’il refuse de la mener à un théâtre parce qu’il a besoin de travailler, elle ne pourra jamais se figurer que cette raison soit autre chose qu’un prétexte. Ce n’est pas sa faute, elle ne comprend rien.

« On parle du cœur de la femme, de ses charmes physiques, des vertus de son âme ; mais de son intelligence, il n’en est pas question, disait il y a quelque temps un rédacteur de la Vie Parisienne. Il semble que cette intelligence est une laideur, un obstacle, une espèce de champignon moral contre lequel on lutte dès l’enfance... La mieux élevée est celle qui ignore le plus de choses... On l’a élevée à l’étouffée, on la fait vivre sous cloche, on l’entortille dans les bandelettes aux mille tours de la niaiserie... »

« Je voudrais, dit le même M. Ed. Texier, qu’on les honorât plus en les flattant moins, qu’on pût leur parler comme à des êtres raisonnables et qu’on ne se crût pas obligé de préparer à leur usage une sorte de conversation fade, douceâtre, écœurante à force de niaiserie, qu’on les