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tirailleurs de l’idée, dispersés à la surface du monde ; elle en formera un peuple imposant qui aura son budget et son armée. Tous ceux que Romulus appela à lui quand il traça l’enceinte de sa ville étaient proscrits, sans asile et sans patrie ; bientôt en se groupant, ils purent prendre le titre qui devint le plus beau qui existât, celui de citoyens Romains, et marcher a la conquête du monde ; de même tous les artistes, écrivains, inventeurs, aujourd’hui séparés, sans lien entre eux, formeront, en se réunissant, la cité de l’intelligence et feront eux aussi la conquête de l’univers.

II

En attendant qu’unis et serrés les uns contre les autres, les inventeurs forment une phalange indissoluble, ils vont, disséminés par le monde, ils errent inquiets, cherchint la vérité et un asile. Ils n’ont pas de toit où abriter leur tête, car ils effrayent tous les timides ; et comme Hercule et comme Esus, ils obéissent à cette voix du progrès qui leur crie sans cesse : Marche ! marche !

Un prince cesse-t-il de les protéger, ils vont à une autre cour chercher quelque asile ; une université leur ôte leur chaire, ils vont chercher une autre tribune ; et quand ils ne peuvent la trouver, ils se retirent, comme Abeilard, dans le désert et y portent la vie !

Ils comprennent, avant tous les autres, la grande union des hommes ; ils ne s’inquiètent pas de la patrie de leurs auditeurs : que leur importe ? pourvu que leur voix soit entendue et forme des disciples. Jadis les apôtres parcouraient le monde pour répandre leur foi ; ils étaient pauvres et persécutés, et finissaient par le martyre. Plus tard les portes, comme Camoëns, Cervantès et Dante étaient chassés d exil en exil ; puis ce sont les inventeurs qui errent ainsi :