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CHAPITRE III
LE PLAISIR DU BEAU EST-IL EN OPPOSITION AVEC l’ACTION ET AVEC LE SENTIMENT DU RÉEL ?

L’école évolutionnisle, comme l’école Kantienne et criticiste, a tort, selon nous, à d’intellectualiser à l’extrême le beau. Des trois éléments qui se trouvent dans tout état mental, sensibilité, intelligence et activité, l’élément sensible est notablement restreint par ces écoles dans l’émotion esthétique ; quant à l’élément actif, il est presque totalement exclu. Nous avons essayé de rétablir le premier de ces deux éléments négligés par l’école anglaise, d’agrandir ainsi le domaine du beau et de l’égaler même au domaine de la vie ; il nous reste à examiner le second.

Puisque l’émotion esthétique consiste en grande partie dans un ensemble de désirs tendant à se réaliser, l’action sort naturellement de l’art et de la contemplation du beau, et le sentiment esthétique est alors plus complet que jamais ; l’art est action non moins que passion, par cela même qu’il est désir non moins que plaisir, besoin réel