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CHAPITRE IV
LA RIME RICHE.

Nous avons vu que le vers est constitué avant tout par le rythme, le nombre et la mesure : il est la pensée à la fois pleine et mesurée, la pensée devenue chantante sous l’influence de l’émotion. Dans les lettres de G. Flaubert à G. Sand se trouve, au milieu de paradoxes, cette remarque qui confirme ce que nous avons dit sur les rapports du rythme et de la pensée : « Dans l’harmonie des mots, écrit Flaubert, dans la précision de leurs assemblages, n’y a-t-il pas une vertu intrinsèque, une espèce de force divine, quelque chose d’éternel comme un principe ? Ainsi, pourquoi y a-t-il un rapport nécessaire entre le mot juste et le mot musical ? Pourquoi arrive-t-on toujours à faire un vers quand on resserre trop sa pensée ? La loi des nombres gouverne donc les sentiments et les images, et ce qui paraît être l’extérieur est le dedans. » Si la loi des nombres est le dedans de la prose même, à plus forte raison est-elle le dedans de la versification, qui ne fait que la rendre sensible et régulière. Quant à la rime, comme nous l’avons prouvé,