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CHAPITRE VII
DANS QUELLE MESURE LA POÉSIE PEUT S’INSPIRER DES IDÉES SCIENTIFIQUES ET PHILOSOPHIQUES

Nous avons vu que l’art tend aujourd’hui à s’inspirer de la science, des lois de la nature qu’elle découvre, des grandes doctrines morales, sociales, métaphysiques qui ont renouvelé le fond des idées en notre siècle. L’union de l’esprit scientifique et philosophique s’est déjà manifestée dans l’auteur de Faust et dans Schiller (dont les poésies philosophiques, selon Lange, ont une grande profondeur). Le problème métaphysique du mal n’a été posé nulle part avec plus de force que dans le Caïn de Byron, — son chef-d’œuvre peut-être en même temps que son œuvre la plus philosophique. Les vers qui ont illustré Léopardi sont des vers philosophiques. Les plus puissantes visions de la Légende des siècles et des Contemplations, où se trouve mêlé, comme dit Victor Hugo lui-même, Ézéchiel à Spinoza, ont toujours un sens moral, social ou métaphysique, d’où elles ne tirent pas leur moindre valeur. Mais il y a ici des écueils de diverses sortes auxquels les écrivains de la génération présente nous paraissent souvent se heur-