Nous sommes descendus aussi bas qu’on peut descendre dans le système épicurien, mais la pensée, après avoir suivi cette sorte de dialectique descendante, aspire à remonter. A présent que nous tenons fortement le premier anneau de cette chaîne par laquelle Epicure s’efforce de rattacher la vertu au plaisir, examinons l’un après l’autre tous les anneaux intermédiaires ; comment pourrons-nous, en partant du plaisir le plus bas, le plaisir du ventre, parvenir au sentiment moral et à la dignité du sage qu’Epicure s’efforce de conserver dans son système ?
I. — Jusqu’à présent nous n’avons guère considéré dans notre analyse que le plaisir, fin unique du désir. Il nous reste à introduire un élément avec lequel chacun doit compter dans la réalité, la douleur.
Tout plaisir, quel qu’il soit, est en lui-même un bien (καθ᾽ ἑαυτήν)[1]; c’est là le principe de la philosophie utili-
- ↑ Diog. L., X, 129. Πᾶσα οὗν ἡδονὴ διὰ τὸ ἔχειν φύσιν οἰκείαν ἀγαθόν. Ib., 141 : Οὐδεμία ἡδονὴ καθ᾿ ἑαυτὴν κακόν.