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GENÈSE DE L’IDÉE DE TEMPS

à Choisy, vous vous écriez : c’est plus long que je ne croyais. Ce serait donc, ici encore, l’élément d’attention, d’attente et d’appétition qui serait la chose importante.

Nous nous représentons et estimons objectivement une durée par la série des états de conscience représentables et effectivement représentés que nous plaçons dans cette durée. En d’autres termes, nous jugeons la longueur du temps écoulé par la série de souvenirs que nous y intercalons. Ce dont nous ne nous souvenons pas ne peut naturellement entrer dans la série. Il en résulte cette conséquence que, plus nous aurons des souvenirs nombreux, intenses et distincts à intercaler entre deux extrêmes, plus l’intervalle nous paraîtra grand. Or, l’enfant a beaucoup de représentations nombreuses et distinctes à loger dans une année. Au contraire, pour l’homme mûr, les souvenirs se fondent et se recouvrent, et il ne reste que quelques points saillants. C’est là la principale explication du raccourcissement apparent des années. Inversement, si un songe d’une nuit paraît durer un siècle, c’est qu’il y a eu une succession très rapide d’images vives et distinctes : la série en se remplissant paraît s’allonger.

Maintenant, quelles sont les représentations