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introduction.

phie populaire et une science populaire, la religion dogmatique et mythique tend à devenir un système d’idées antiphilosophiques et antiscientifiques. Si ce caractère n’apparaît pas toujours, c’est à la faveur du symbolisme dont nous avons parlé, qui conserve les noms en transformant les idées et en les adaptant aux progrès de l’esprit moderne.

Les éléments qui distinguent la religion de la métaphysique ou de la morale, et qui la constituent proprement religion positive, sont, selon nous, essentiellement caducs et transitoires. En ce sens, nous rejetons donc la religion de l’avenir comme nous rejetterions l’alchimie de l’avenir ou l’astrologie de l’avenir. Mais il ne s’ensuit pas que l’irréligion ou l’a-religion, — qui est simplement, la négation de tout dogme, de toute autorité traditionnelle et surnaturelle, de toute révélation, de tout miracle, de tout mythe, de tout rite érigé en devoir, — soit synonyme d’impiété, de mépris à l’égard du fond métaphysique et moral des antiques croyances. Nullement ; être irréligieux ou a-religieux n’est pas être anti-religieux. Bien plus, comme nous le verrons, l’irréligion de l’avenir pourra garder du sentiment religieux ce qu’il y avait en lui de plus pur : d’une part, l’admiration du Cosmos et des puissances infinies qui y sont déployées ; d’autre part, la recherche d’un idéal non seulement individuel, mais social et même cosmique, qui dépasse la réalité actuelle[1]. Comme on peut soutenir cette thèse que la chimie

  1. Voir 3e partie, ch. I.