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introduction.

tout métaphysique et purement philosophique. Bien mieux, avec cette méthode, comme le christianisme est la forme supérieure de la religion, tous les philosophes finiront par être des chrétiens ; enfin, l’universalité, la catholicité étant l’idéal du christianisme, nous serons tous catholiques sans le savoir et sans le vouloir.

Pour celui qui, sans nier les analogies finales, tient à prendre pour point de départ les différences spécifiques (ce qui est la vraie méthode), toute religion positive et historique a trois éléments distinctifs et essentiels : 1o un essai d’explication mythique, et non scientifique des phénomènes naturels (action divine, miracles, prières efficaces, etc.), ou des faits historiques (incarnation de Jésus-Christ ou de Bouddha, révélations, etc.). — 2o un système de dogmes, c’est-à-dire d’idées symboliques, de croyances imaginatives, imposées à la foi comme des vérités absolues, alors même qu’elles ne sont susceptibles d’aucune démonstration scientifique ou d’aucune justification philosophique ; — 3o un culte et un système de rites, c’est-à-dire de pratiques plus ou moins immuables, regardées comme ayant une efficacité merveilleuse sur la marche des choses, une vertu propitiatrice. Une religion sans mythes, sans dogmes, sans culte ni rites, n’est plus que la religion naturelle, chose quelque peu bâtarde, qui vient se résoudre en hypothèses métaphysiques. Par ces trois éléments différentiels et vraiment organiques, la religion se distingue nettement de la philosophie. Aussi, au lieu d’être aujourd’hui, comme elle Ta été autrefois, une philoso-