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les idées philosophiques et sociales dans la poésie.

manités. Ne demandez pas de droits pour le peuple tant que le peuple demandera des têtes [1]. »

Après les événements de [’année terrible, il exprime de nouveau éloquemment le droit de l’individu devant les masses :


                      Le droit est au-dessus de tout ;
Tous ne peuvent rien distraire
Ni rien aliéner de l’avenir commun.
Le peuple souverain de lui-nifime, et chacun
Son propre roi ! .....
.................
Quoi ! l’homme que voilà qui passe, aurait mon ûme ?
Honte ! il pourrait demain, par un vote hébété,
Prendre, prostituer, vendre ma liberté !
Jamais
.................
Qui donc s’est figuré que le premier venu
Avait droit sur mon droit ! qu’il fallait que je prisse
Sa bassesse pour joug, pour règle son caprice !
.................
Que je fusse forcé de me faire chaînon
Parce qu’il plaît à tous de se changer en chaîne !
.................
Car la science en l’homme arrive la première,
Puis vient la liberté [2] ..........


D’ailleurs, tout en protestant ainsi au nom du droit, il n’en pardonne pas moins toujours au nom de la pitié :


Mais quoi, reproche-t-on à la mer qui s’écroule
L’onde, et ses millions de têtes à la foule ?
Que sert de chicaner ses erreurs, son chemin,
Ses retours en arrière, à ce nuage humain,
A ce grand tourbillon des vivants, incapable,
Hélas ! d’être innocent comme d’être coupable ?
A quoi bon ? Quoique vague, obscur, sans point d’appui,
Il est utile ; ..........
..........tout germe et rien ne meurt…
Dans les chutes du droit rien n’est désespéré [3].



Après avoir montré comment


Le peuple parfois devient impopulaire.


il ajoute ce vers admirable :


Personne n’est méchant, et que de mal on fait !

  1. V. Hugo, Littérature et philosophie mêlées, Ier volume, p. 217.
  2. L’Année terrible, p. 241.
  3. Prologue de l’Année terrible.