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PRÉFACE

EDUCATION LIBRE

Ce livre a été écrit spécialement en vue des programmes nouveaux, qui recommandent de commencer l´éducation morale des jeunes enfants dès l´instant où ils apprennent à lire.

La meilleure des leçons étant l´exemple, comme le rappellent les circulaires relatives à l’enseignement primaire, nous avons exclusivement employé dans ce volume les petits « récits moraux » dont elles prescrivent l’usage. Ces récits très courts, tous inédits, sont terminés, ainsi que l’indiquent encore les programmes, par des « préceptes » clairs et brefs qui complètent les exemples. Nous avons pensé que l’enseignement moral , suivant les termes mêmes de ces programmes, « s’exerce dans une toute autre sphère que le reste de l’enseignement. » L’éducation, ici, « n’a pas pour but de faire savoir , mais de faire vouloir. »

Pour la même raison il faut, selon nous, montrer aux enfants la beauté du devoir bien plus encore que la laideur du vice. On doit se garder de mettre sous leurs yeux des exemples trop pernicieux, même dans le but de les prémunir ; il ne faut pas les habituer à la pensée du vice, sous prétexte de les en corriger. Aussi n’avons-nous parlé dans ce premier volume que des défauts enfantins, non des vices d’un autre âge, de l’ivrognerie, de la mauvaise conduite, des mauvais traitements à l’égard des parents, du crime ou bien de l´échafaud. « Il est des choses, a dit un philosophe antique, qu’il vaut mieux ignorer que connaître ; » nous ajouterons qu’en tout cas il vaut mieux les connaître le plus tard possible. La morale enfantine n’est pas tout à fait la morale virile.

Dans les limites où nous l’avons volontairement renfermé, notre livre est un développement du cours officiel de « morale élémentaire » aussi méthodique, croyons-nous, qu’il était possible de l’être sans nuire à l’intérêt et sans être infidèle à cette pensée du programme : « Un « cours de morale régulier, mais froid, n’enseigne pas la morale aux « enfants, parce qu’il ne la leur fait pas aimer 1. »

1 . Nous avons suivi dans ce volume la mème méthode que dans notre Première année de Lecture courante. Pour combattre la tendance des élèves à lire mécaniquement comme des perroquets et sans attacher de sens aux phrases, — le « psittacisme » dont parle Leibnitz, — nous avons multiplié les vignettes encore plus que nous ne l’avions fait dans notre autre volume. Ces vignettes, qui représentent en action les divers personnages des récits, nous les avons disposées de telle sorte que chaque moment du récit se trouve fixé sous les yeux de l’enfant.

Au bas des pages, nous avons placé un programme de grammaire, de sciences usuelles et de morale répondant aux programmes officiels. Des numéros placés en marge, comme dans notre Première année de Lecture, correspondent avec des questions numérotées, où se trouvent indiqués aux maîtres les sujets réglementaires qu’ils pourront traiter à propos de chaque récit.