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L’ENSEIGNEMENT SECONDAIRE ET SUPÉRIEUR.

et des cours fermés, qui divise le personnel enseignant. Les uns se prononcent pour le maintien des cours accessibles au grand public ; les autres entendent réserver les leçons aux seuls étudiants. Les deux choses ne semblent pas inconciliables et, en fait, sont conciliées. L’enseignement public « convie la nation entière et les étrangers mêmes à l’étude des sciences et des lettres, sans cesse renouvelée et rajeunie par l’autorité du monde savant. Le cours public est une école intellectuelle, largement ouverte ».

Dans les universités allemandes, le professeur travaille entouré d’élèves et de disciples. Plusieurs fois par semaine, il les réunit pour entendre ses leçons, qu’il peut multiplier sans effort parce qu’elles ne sont qu’une causerie familière sur la science dont il est perpétuellement occupé ; il élargit ou rétrécit son cadre, sans être gêné par aucun autre programme que l’intérêt de l’auditoire. Ce contact fréquent, souvent quotidien, du maître et des élèves, permet, selon M. Bréal, d’atteindre rapidement de grands résultats. Ce système avait été introduit à l’École pratique des hautes études ; il a passé dans la plupart de nos facultés. Il ne reste qu’à le généraliser en annexant aux cours publics des conférences privées, dont chaque professeur aura la latitude de régler l’objet spécial, de fixer le nombre et la durée. La faculté des lettres de Paris n’a point changé ses habitudes anciennes ; elle a procédé « par addition », sans se croire obligée à rien supprimer. Elle n’avait autrefois que des auditeurs, ou du moins elle ne reconnaissait pas « d’existence légale » à ses élèves perdus dans la foule ; elle a aujourd’hui des élèves organisés en un corps régulier. Les crédits inscrits au budget pour les boursiers de licence et d’agrégation ont assuré l’existence et le développement d’une institution qui rendra des services, ne fût-ce qu’au point de vue d’un meilleur recrutement du personnel enseignant. Malheureusement ces auditeurs, dit M. Bréal, ne sont pas encore des étudiants ; ce sont toujours des candidats. « Ils en portent le nom ; ils en ont l’humeur inquiète, le manque de liberté d’esprit, le désir de finir et de s’en aller. » Tandis qu’en d’autres contrées, les années passées à l’Université sont l’époque heureuse de la vie, qu’on la prolonge volontiers et qu’on la recommence avec joie, « nos boursiers de licence et