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L’ÉDUCATION PHYSIQUE ET L’HÉRÉDITÉ.

me prenne par la main, comme l’a fait jusqu’ici l’Université. On ne m’a appris qu’à être passif. Un citoyen, dites-vous ? Je serais peut-être un citoyen, si j’étais un homme. »

On sait que l’Académie de médecine s’est émue de ce surmenage, M. Peter s’est prononcé énergiquement dans cette question. Les programmes universitaires, selon lui, ne sont pas faits pour ce qu’on peut appeler la moyenne des aptitudes intellectuelles ; ils dépassent cette moyenne, et chaque jour, sous prétexte de les compléter, on les rend encore plus impossibles. Quand un muscle se fatigue à l’excès, il éprouve une courbature, causée par l’accumulation des produits de désintégration ; de même, le cerveau, fatigué outre mesure est exposé à un encombrement des déchets de la vie, à une véritable courbature. Le premier symptôme de cet état, c’est le mal de tête violent, la céphalalgie. Si ce premier avertissement n’est point écouté, si le travail persiste, si la courbature augmente, la céphalalgie devient périodique, de plus en plus fréquente, s’exaspère sous l’effort intellectuel. Une sorte de voile s’étend sur l’intelligence, les idées se brouillent. Il y a là, dit M. Peter, quelque chose d’analogue à la crampe des écrivains dans le muscle, un spasme fonctionnel qui atteint le cerveau. Et ce n’est là que le début des phénomènes pathologiques.

Le surmenage cérébral et intellectuel n’existe guère dans les écoles primaires[1]. Dans l’enseignement secon-

  1. Le surmenage peut exister dans les villes, mais non dans les écoles rurales. Les enfants font trop peu de devoirs à la maison, manquent trop souvent l’école, pour éprouver la fatigue cérébrale. Les dangers qui existent réellement dans l’école du village ne proviennent pas de la surcharge d’esprit, mais bien du séjour dans une atmosphère nécessairement viciée. Voilà la plaie. Voici le remède : obliger les communes arriérées et récalcitrantes à se procurer des locaux scolaires suffisamment vastes et munis d’un bon mobilier. D’autre part, voici quelques règles à suivre pour ne pas fatiguer les enfants dans les écoles primaires : « Règles formulées par la Société d’hygiène de Genève (Revue pédagogique du 15 mars) : On doit attribuer les premières heures de la matinée aux branches qui nécessitent le plus d’effort intellectuel. Les leçons doivent être interrompues toutes les heures par une récréation permettant à l’élève de se livrer à un exercice corporel ». En France, le règlement ne permet pas une récréation à toutes les heures ; mais on peut faire faire quelques mouvements de bras, les élèves étant debout à leur place. « En général, le maître doit suspendre son enseignement dès qu’il surprend des signes de fatigue ou d’agitation dans son auditoire et lui accorder un repos surplace de quelques instants. Chaque leçon doit être donnée de telle sorte que l’enfant soit alternativement actif ou passif, c’est-à-dire qu’il soit mis en demeure de parler, d’écouter et d’appliquer l’enseignement donné. On évi-