Page:Guy de Maupassant - Une vie.djvu/56

Cette page a été validée par deux contributeurs.

Elle balbutia : « Mais quoi ? Qu’y a-t-il donc ? »

— Tu le sauras tout à l’heure, dit le baron.

La calèche attelée s’avança, Mme  Adélaïde descendit de sa chambre en grand apparat au bras de Rosalie, qui parut tellement émue par l’élégance de M. de Lamare que petit père murmura : « Dites donc, vicomte, je crois que notre bonne vous trouve à son goût. » Il rougit jusqu’aux oreilles, fit semblant de n’avoir pas entendu, et, s’emparant du gros bouquet, le présenta à Jeanne. Elle le prit plus étonnée encore. Tous les quatre montèrent en voiture ; et la cuisinière Ludivine, qui apportait à la baronne un bouillon froid pour la soutenir, déclara : « Vrai, madame, on dirait une noce. »

On mit pied à terre en entrant dans Yport et, à mesure qu’on avançait à travers le village, les matelots dans leurs hardes neuves, dont les plis se voyaient, sortaient de leurs maisons, saluaient, serraient la main du baron et se mettaient à suivre comme derrière une procession.

Le vicomte avait offert son bras à Jeanne et marchait en tête avec elle.

Lorsqu’on arriva devant l’église, on s’arrêta ; et la grande croix d’argent parut, tenue droite par un enfant de chœur précédant un autre gamin rouge et blanc qui portait l’urne d’eau bénite où trempait le goupillon.

Puis passèrent trois vieux chantres dont l’un boitait, puis le serpent, puis le curé soulevant de son ventre pointu l’étole dorée, croisée dessus. Il dit bonjour d’un sourire et d’un signe de tête ; puis, les yeux mi-clos, les lèvres remuées d’une prière, la barrette