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Et tout de suite ils causèrent. Ce fut instantané chez l’un et chez l’autre, comme un feu qui prend bien dès qu’une allumette l’a touché. Il semblait qu’ils se fussent communiqué d’avance leurs opinions, leurs sensations, qu’une même nature, qu’une même éducation, les mêmes penchants, les mêmes goûts, les eussent prédisposés à se comprendre et destinés à se rencontrer.

Peut-être y avait-il là quelque adresse de la part de la jeune femme ; mais la joie qu’on éprouve à trouver quelqu’un qui vous écoute, qui vous devine, qui vous répond, qui vous fournit des réparties par ses répliques, animait Mariolle d’un bel entrain. Flatté d’ailleurs par la façon dont elle l’avait reçu, conquis par la grâce provocante qu’elle déployait pour lui et par le charme dont elle savait envelopper les hommes, il s’efforçait de lui montrer cette couleur d’esprit un peu voilée, mais personnelle et délicate, qui lui attirait, quand on le connaissait bien, de rares et vives sympathies.

Tout à coup elle lui déclara :

— C’est vraiment fort agréable de causer avec vous, monsieur. On m’avait prévenue d’ailleurs.

Il se sentit rougir, et hardiment :

— Et moi on m’avait annoncé, madame, que vous étiez…

Elle l’interrompit :

— Dites une coquette. Je le suis beaucoup avec les gens qui me plaisent. Tout le monde le sait, je