Page:Guy de Maupassant - Notre Cœur.djvu/203

Cette page a été validée par deux contributeurs.

Elles s’embrassèrent de nouveau, et Mme  de Burne, ayant prié qu’on fît venir un fiacre, s’en alla.

Le cheval boitait, traînait avec une peine infinie la vieille voiture ; et cette boiterie, cette fatigue de l’animal, la jeune femme les sentait aussi en elle. Comme la bête poussive, elle trouvait le trajet long et dur. Puis le plaisir de voir André la consolait, puis le souci de ce qu’elle allait faire l’affligeait.

Elle le trouva gelé derrière la porte. Les fortes giboulées tournoyaient dans les arbres. La grêle sonnait sur leur parapluie, pendant qu’ils allaient vers le chalet. Leurs pieds enfonçaient dans la boue.

Le jardin était triste, lamentable, mort, fangeux. Et André était pâle. Il souffrait beaucoup.

Quand ils furent entrés :

— Dieu ! qu’il fait froid ! dit-elle.

Un grand feu pourtant flambait dans les deux pièces. Mais, allumé seulement depuis midi, il n’avait pu sécher les murs imprégnés d’humidité ; et des frissons couraient sur la peau.

Elle ajouta :

— J’ai envie de ne pas quitter tout de suite ma fourrure.

Elle l’entr’ouvrit seulement, et elle apparut dessous, frileuse dans son corsage garni de plumes, pareille aux oiseaux émigrants qui ne restent jamais au même endroit.

Il s’assit à côté d’elle.