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tendresse qui venait encore à lui, bien qu’il fût un prêtre.

Il la sentait dans leurs regards plus mouillés de piété que les regards des moines, dans leurs extases où leur sexe se mêlait, dans leurs élans d’amour vers le Christ, qui l’indignaient parce que c’était de l’amour de femme, de l’amour charnel ; il la sentait, cette tendresse maudite, dans leur docilité même, dans la douceur de leur voix en lui parlant, dans leurs yeux baissés, et dans leurs larmes résignées quand il les reprenait avec rudesse.

Et il secouait sa soutane en sortant des portes du couvent, et il s’en allait en allongeant les jambes comme s’il avait fui devant un danger.

Il avait une nièce qui vivait avec sa mère dans une petite maison voisine. Il s’acharnait à en faire une sœur de charité.

Elle était jolie, écervelée et moqueuse. Quand l’abbé sermonnait, elle riait ; et quand il se fâchait contre elle, elle l’embrassait avec véhémence, le serrant contre son cœur, tandis qu’il cherchait involontairement à se dégager de cette étreinte qui lui faisait goûter cependant une joie douce, éveillant au fond de lui cette sensation de paternité qui sommeille en tout homme.

Souvent il lui parlait de Dieu, de son Dieu, en marchant à côté d’elle par les chemins des champs. Elle ne l’écoutait guère et regardait le ciel, les herbes, les fleurs, avec un bonheur de vivre qui se voyait dans ses yeux. Quelquefois elle s’élançait pour attraper une bête volante, et s’écriait en la rapportant : « Regarde, mon oncle, comme elle est jolie ; j’ai envie de l’embrasser. » Et ce besoin « d’embrasser des mouches » ou des grains de lilas inquiétait, irritait, soulevait le prêtre, qui retrouvait encore là cette indéracinable tendresse qui germe toujours au cœur des femmes.

Puis, voilà qu’un jour l’épouse du sacristain, qui faisait le ménage de l’abbé Marignan, lui apprit avec précaution que sa nièce avait un amoureux.

Il en ressentit une émotion effroyable, et il demeura suffoqué, avec du savon plein la figure, car il était en train de se raser.