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L’autre redressa sa face coléreuse :

— Je veux dire que je revenais en France relativement riche, que je voulais aller à Paris, que je voulais jouir un peu de ce que je rapportais, après tant d’années d’exil, et que ce damné naufrage m’a tout pris !… Je n’ai pu sauver que les quelques milliers de francs enfermés dans ma ceinture, le reste, une fortune, est là-bas, aux Pierres-Noires, au fond de la mer, où j’aurais dû rester !…

— Mon pauvre gars…

— Oui, sans Corentin, je ne revenais pas !… Mais j’ai pensé aux vieux, à Yvonne ; alors la soif de les revoir, de les embrasser, quand même !… J’ai été lâche, lâche !… Et… Et… Voilà !… Oh ! je suis trop malheureux, à la fin, c’est trop de misère !…

Cette fois, des larmes, un torrent de larmes, et ce cri : — Des tombes !… Une folle !… C’est fait pour moi !

— Allons, allons ! reprit Pierre, essayant de le calmer. Tu peux encore te tirer d’affaire, tout n’est pas désespéré. Reste ici, puisque le sort t’y a rejeté, tu achèteras un bateau, tu feras la pêche comme les camarades ; tu es jeune, fort, ça peut aller !…

Il ne disait toujours rien ; cependant, peu à peu, le calme sembla renaître en lui. Une sorte de sourire détendit ses lèvres ; l’image de Mariannik se