Page:Gustave Toudouze - Péri en mer, 1905.pdf/62

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

longer la jetée et de rentrer dans le port, il a le temps d’apercevoir, au premier rang, penchés sur le parapet, maître Guivarcʼh et sa fille ; il agite à bout de bras son suroît, jetant d’un cri qu’on devine plus qu’on ne l’entend distinctement dans la grosse colère continuante du vent et de la mer :

— Mariannik !

Suffoquée de joie, elle murmure tout bas :

— Corentin !

Le premier aveu au grand jour, à la face de tous, du tendre secret enfermé au fond de son cœur !

Déjà le canot, ses voiles carguées, file sous les bras robustes qui pèsent sur les avirons, et l’on constate qu’il ramène des naufragés, dont les uns aident à la manœuvre, les autres sont étendus inertes au fond du bateau.

Il coupe droit à travers le port, passant entre les barques de pêche sans les toucher, et vient ranger le quai, à la hauteur de l’hôtel de la Marine, celui que tient la veuve de l’ancien maire, la bienfaitrice et la doyenne de Camaret, Mme Dorso.

— Tante Rosalie ! crie Garrec de sa voix joyeuse, je vous amène du monde !

Prévenue, prête comme toujours au devoir, elle s’est avancée jusque sur la cale, suivie de sa fille et de ses bonnes. Elle joint les mains, apitoyée :

— Oh ! mes pauvres gens, comme vous voilà faits !… Entrez vite vous sécher et vous chauffer ;