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C'est un gouffre vertigineux, un bruit de milliers de chaudières en ébullition, des détonations terribles dans les profondes cavernes s’ouvrant sous le Toulinguet, une folie des éléments en fureur.

Cependant parfois, dans une seconde d'accalmie entre deux chocs grondants, une voix perce ce fauve hurlement de la Nature, une mince chanson s’élève, souple, gracieuse, d’un doux bercement monotone, et des paroles gémissent :

Ha glevaz-te, ha glevaz-te
Pez a lavaraz den Doue
Dʼar roue Gradlon enn Is be?

. . . . . . . . . . . .

Boum ! boum ! fait la mer, mugissant son infernal accompagnement à ce chant de Bretagne qui déroule sur la grève la tragique légende de la submersion de la ville d’Is.

Puis, de nouveau, le chant, les rudes syllabes gaéliques qui bourdonnent :

As-tu entendu, as-tu entendu
Ce qu’a dit l’homme de Dieu
Au roi Gradlon qui est à Is ?

. . . . . . . . . . . .

et que la base profonde de l’Océan étouffe encore.

Le jour se lève, des teintes de cuivre glissent au loin sur les flots, comme pour mieux éclairer cette