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surnom : le Revenant, que la superstition locale, après le lui avoir appliqué, dans un premier moment de surprise incrédule, trouvait merveilleusement adapté à un être aussi bizarre, aussi déconcertant.

Parfois, après ces absences prolongées, comme pour se faire excuser, rentrer en grâce auprès de Mariannik, dont la gêne auprès de lui augmentait, il rapportait à sa cousine quelque babiole ramassée dans les magasins de Brest, un foulard de soie, une ceinture, un joli cadeau que sa parenté l’autorisait à faire, mais que la jeune fille n’acceptait qu’avec un secret serrement de cœur, y trouvant un muet engagement pris avec lui.

En réalité, il pesait sur elle, sur ses pensées, sur son cœur, ainsi qu’un invincible et renaissant cauchemar ; non pas qu’elle sentit de vive répulsion pour lui, au contraire : c’était même de se sentir presque sans force, sans défense contre Hervé, qui la troublait davantage. Elle eût préféré le haïr ; chaque fois qu’il disparaissait, elle éprouvait d’abord un soulagement, pour se retrouver tremblante, indécise, doutant d’elle-même, toutes les fois qu’il revenait prendre place à la table commune, entre elle et Yvonne.

Toute la période hivernale, il en fut ainsi ; elle se trouva cahotée entre ses secrets désirs, la force qui la poussait vers le premier choix de son cœur, Tonton Corentin, et cette espèce d’incroyable