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aux flots grondants, presque malgré lui ; c’était cet ancien enfant du pays, cet ancien compagnon de jeux, qui se dressait entre Mariannik et lui, venant lui voler son amour, sa femme ! Oh ! se Revenant.

Les mois d’hiver furent atroces pour lui, avec ce poison dans les veines, cette fomentation de rage et de douleur incendiant son sang.

Cependant sa consolation fut de voir que la jeune fille ne paraissait pas encourager l’autre, que sa froideur s’étendait aussi à ce cousin. Peut-être, en effet, la terrorisait-il ? Une espérance lui entrait au cœur, lorsqu’il se rappelait mille détails qui semblaient devoir les lier à jamais, le mouchoir flottant à la pointe de Pen-Tir, l’étreinte encourageante du cimetière, en ce jour funèbre de décembre. Mais depuis, plus rien !

En apercevant Mariannik en face de lui, dans la solitude matinale de la lande encore déserte, au milieu de la légère brume transparente que le soleil faisait lever, en pompant la rosée de la nuit sur les mousses, les bruyères et les genêts, Corentin Garrec eut un recul involontaire, une suspension de respiration.

Seuls, ils étaient seuls tous deux sous le grand ciel bleu, d’une pureté merveilleuse : lui, tout tremblant, elle, détachant sa jolie tête brune, casquée de la coiffe blanche, son corps robuste et souple, à la taille ferme sous le fichu chastement croisé sur ses seins, à la jupe plissée retombant en