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comme suspendue, son doigt levé, et balbutie :

— L’Église !… Le Glas !…

C’est l’heure ; il va falloir faire appel à tout son courage, à toutes ses forces, pour l’horrible cérémonie : on va venir la prendre, l’emporter pour toujours.

Déjà quelque chose de sourd accompagne la langue de fer de la cloche battant sinistrement le bronze ; déjà des chants lointains roulent là-bas, au fond des épaisseurs blanches, et cela se rapproche, s’accentue, plus vibrant.

Un coup de vent éclaircit un peu le brouillard, l’enlève et le tient suspendu à quelques mètres sur les mousses, les rocailles ; on distingue, dans le bas, l’anse du Veryhacʼh, les varechs trempés d’écume, des crêtes floconneuses de grosses vagues, se jetant au pied des falaises de granit, et c’est, vers Lagatjar, la croix d’argent qui se dresse d’abord, tenue haut par son porteur, derrière lui les prêtres, les chantres, un flot noir d’amis, de femmes, ceux de Camaret.

Un nouveau souffle venu de la mer, et tout disparaît encore sous des brumes plus épaisses, amenées du large. Yves Dagorn peut croire, un instant, qu’il a rêvé, que ce n’est pas vrai, qu’une fantasmagorie a troublé ses prunelles.

Les chants s’accentuent, plus graves, plus tonnants, et le nuage blanc crève brutalement, laissant voir le cortège, à présent tout près de la