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colorée dans la masse plus terne des poissons.

Balanec, affriandé, tout à son commerce, examine, tâte, mesure avec un mètre sorti de sa poche pour voir si les langoustes ont la longueur voulue par les règlements de la pêche.

Il en saisit une, grognonne :

— A-t-elle ses vingt centimètres ton écrevisse ?

La queue étendue à plat, la mesure est dépassée ; il la replace sur les autres, bougonnant :

— Oui, oui !… Mais c’est jeune !

— Des bêtes si voraces, ces raies ! — explique un pêcheur à ses voisins. Quand on pense que ça mange ses petits, que ça avale jusqu’à des écrevisses, enfin tout ce que ça trouve !…

Tout un cercle de Camaretois est là, penché au bord du quai, donnant son avis sur ce que rapporte le camarade, avec cette curiosité machinale, instinctive qui pousse le pêcheur vers le poisson.

— Il y en a, ma Doué ! Pas à plaindre, le gars !

Tréboul, de la Marie-Anne, riposte :

— Pas à plaindre !… Faut voir !… Dame ! qu’on en a eu aussi du mal, de la pointe de Brézellec au Raz, et de Sein à Molènes !… Heureux encore qu’on n’y soit pas resté, dans le Caillou !…

Il marmotte ces derniers mots entre ses dents, en jetant un regard de côté au patron, trop occupé pour l’entendre ; mais on devine qu’il a dû se passer des choses pas ordinaires, et que ce n’est point pour rien que le 888 est resté quatre jours dehors.