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surtout par sa voix mélodieuse dominant le tumulte des autres voix.

Sans se faire prier, sitôt installée devant l’auge pleine de sardines, après avoir paru chercher un moment dans sa tête, levant son couteau de bois pour donner le signal, elle commença la ballade du seigneur Nann et de la Fée, annonçant en langue bretonne :

Aotrou Nann hag ar Gorrigan.

Toutes, attentives, bien que connaissant de longue date cette légende du seigneur qui, revenant auprès de sa fiancée, après une longue absence, rencontre une Korrigan, refuse son amour et meurt, tué par le sort qu’elle lui a jeté, poursuivaient activement leur besogne, reprenant le refrain plaintif ou écoutant la mélancolique chanson :

Dites-moi, ma belle mère, pourquoi les cloches sonnent-elles ?
Pourquoi les prêtres chantent-ils en bas, vêtus en blanc ?

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

C’était comme le souffle embaumé et mystérieux de la lande passant à travers la grande salle, chassant pour un moment les senteurs fortes de l’huile chaude, les fétides exhalaisons du travail de la confiserie.